Pedostop

Témoignage de M. sur notre page Facebook. Juillet 2014.

"J’avais environ six ans…c’était mes 2 voisins. Une enfance marquée d’environ 7 années d’abus sexuels. Je vivais dans le déni, l’oubli, la banalisation de ces abus…je ne suis rien donc les abus n’étaient rien. Ce n’était pas grave. 

Et puis la vie continuait… 2 ans de cela …je rencontre mon petit ami et baaaaammm toutes ces années d’abus m’explosent à la figure, c’est la catastrophe ….Sa réaction me fait comprendre que rien de tout cela n’est normale, que c’est grave…J’avais cette vérité amère devant mes yeux d’enfant.. De là, commence une souffrance interminable, des flashs horribles de mon petit corps, de leurs grandes mains sur moi, des odeurs, j’entends leurs voix. Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait, la vie devient insupportable. La peur d’aller au lit, des cauchemars,…je me sens sale, horrible, monstre, la panique d’être dans des foules. La culpabilité est lourde, les nuits sont longues, les crises d’angoisse. Cela devient difficile, de gérer la petite fille en vrac à l’intérieur. De plus, j’étais toujours la cible facile des pervers dans le bus, dans les salles de classes. Je me sens bizarre des autres jeunes filles de mon âge car on se sent nulle. A chaque geste de ces inconnus, j’étais figé, je n’étais plus dans mon corps…j’ai renoncé à mon « moi ». Une vie où je dois faire des efforts surhumains, aller au-delà de mes forces pour réaliser mes petits bouts de rêves. J’essayais de me donner à fond dans mes études, de trouver la sécurité avec mon petit ami. Mes parents ne sont pas au courant et je ne me sens pas prête de les dire, je ne sens toujours pas leur intérêt, la sécurité, une dose d’attention suffisante de leur part. Ils vénèrent ces 2 voisins chez qui j’allais pour des leçons de maths ou ils me surveillaient…

Le temps passe mais la souffrance reste toujours aussi intense…je porte surement leurs péchés, je paye mes dettes… Aujourd’hui, c’est toujours aussi dur d’accepter ce passé lourd mais je me dis que j’en ai fait du chemin. Ces abus, le chemin de guérison m’ont fait perdre beaucoup de choses importantes, beaucoup trop… J’ai souvent des crises où je revis ces scènes, des flashs en plein milieu d’un examen, une humeur massacrante et tout ce qui va avec… C’est un combat quotidien contre mes démons, un défi chaque matin d’avoir peur de les croiser ou de les entendre. Je me demande souvent : qu’est ne va pas chez moi ? J’ai le soutien de la personne à qui je fais confiance et aussi d’une amie- une survivante aussi. Merci à mon ami de m’apaiser et de m’offrir des petits bonheurs. Depuis quelque temps, j’ai mes petits rituels, des petits plaisirs partagés qui me permettent de renouer avec la vie. La vie en ce moment est une lutte infernale mais tous les matins à mon réveil : je perçois ce petit bout de soleil. J’ai 23 ans et je me dis que j’ai vécu trop de choses dans une vie… et dans un petit coin de mon cœur- j’espère avoir ma part de bonheur…."

M., 23 ans

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